IMPASSE JUIF

Saint-Ouen-sur-Seine (93)

Trop nombreuses sont les opérations conçues en plan, à grande échelle, selon des modèles préconçus de ce qu’est une ville « attractive » sans tenir compte des usages déjà présents, de la vie sociale existante ni de la mémoire des lieux.
La ville de Saint-Ouen a accueilli, ces dernières années, un nombre important de ces opérations d’envergure qui l’ont transformé par pans entiers et ont augmenté sa population de 25%. L’ajustement brutal de la Ville aux standards du « Grand Paris » sous l’influence des promoteurs a mené à la destruction totale de certains quartiers, forçant les habitants les plus fragiles à partir.
Ces opérations publiques ont ignoré tout ce qui faisait l’âme et l’identité du lieu, pour y implanter des bâtiments et espaces publics standardisés et aseptisés. Elles ont oublié qu’une ville n’est pas seulement un décor mais avant tout la scène où se jouent le parcours de vie et le quotidien de ses habitants.
L’impasse Juif est une venelle historique au cœur d’un ilot résidentiel du quartier Pasteur-Zola. Elle desservait à l’origine des maisons en bande qui ont pour la plupart été démolies, à l’exception de deux maisons encore habitées.
Elle permet aujourd’hui d’accéder à un espace vert préservé d’une superficie d’environ 2000m², supérieure à celle des squares Helbronner et de l’Abbé Grégoire, comprenant une partie très ensoleillée en fond de parcelle et une partie ombrée par 5 tilleuls majestueux, de plus de 15 mètres de haut sur l’avant. Ce site est bordé par les façades arrière des immeubles donnant sur la rue Pasteur au Nord, dont les fenêtres surplombent le jardin, notamment par la maison de quartier.
Ce lieu est rendu unique tant par la rareté de la nature à Saint-Ouen, qui en fait une zone extrêmement carencée en espaces verts selon l’IAU-IDF, que par les pratiques et les interactions de voisinage spontanées qu’il héberge aujourd’hui, fruit d’une appropriation collective et organique.

 

Photographies : Daniel Maunoury et Itinérances